Loup en Valais: une régulation sans base scientifique, un problème démocratique et écologique!

Loup en Valais: une régulation sans base scientifique, un problème démocratique et écologique!

Le Conseil d’État valaisan comme le Groupe Loup Suisse se sont exprimés récemment suite aux résultats de la régulation proactive qui vient de se terminer (1er sept. 2024 – 31 janvier 2025). Le premier dresse un bilan « positif » de la régulation du loup (article du Temps). Mais sur quelles bases? Certainement pas scientifiques.

Les trois meutes ciblées n’ont tué que 3 bêtes en tout

Trois des meutes ciblées – Les Toules, Hérens-Mandelon et Nendaz-Isérables – n’ont tué qu’un animal de rente chacune. Trois bêtes en tout. Soit 1% des attaques en situation protégée !

L’analyse des chiffres publiés par le Canton montre aussi qu’une grande majorité des attaques a encore lieu dans des alpages non suffisamment protégés, en particulier dans le Haut-Valais.

Une enquête du Tages Anzeiger du 9 janvier dernier montrait que seul 2% des moutons morts en 2024 l’ont été à cause du loup. Près de 57’000 moutons sont ainsi morts l’an dernier, un chiffre en constante hausse ces dernières années (cette statistique ne tient bien sûr pas compte des moutons abattus ou exportés). Le pourcentage de décès des moutons est très élevé (13%) par rapport aux pourcentages d’autres animaux de rente (3,5% pour les bovins par ex.). L’Office fédéral de la sécurité alimentaire et des affaires vétérinaires (OSAV) explique l’augmentation du nombre d’animaux morts par les maladies, les conditions météorologiques et, plus généralement, les conditions d’élevage.

On peut légitimement se demander si l’argent du contribuable est bien utilisé et s’il est utile que des gardes-chasses consacrent des journées entières à tirer des loups sans que l’effet bénéfique de ces tirs de régulation soit démontré.

Le canton du Valais nous apprend d’autre part que 227’000.- ont été versés aux éleveurs pour dédommager les 341 animaux de rente prédatés, soit 665.- par animal. Il mentionne aussi que 16’400 heures ont été consacrées par des employé·e·s de l’administration pour la gestion et les tirs de régulation du loup, ce qui doit correspondre à un montant de l’ordre du million de francs. Que l’on va dépenser année après année, les loups tués étant rapidement remplacés par de nouveaux loups. On peut légitimement se demander si l’argent du contribuable est bien utilisé et s’il est utile que des gardes-chasses consacrent des journées entières à tirer des loups sans que l’effet bénéfique de ces tirs de régulation soit démontré.

Le loup est un prédateur naturel, sa présence est gage d’un meilleur équilibre écologique. Là où il est présent, on constate que les forêts peuvent mieux se rajeunir et assurer notamment leur fonction de protection. Ce qui signifie aussi des coûts en moins pour l’Etat qui ne doit pas recourir à des mesures coûteuses pour protéger les jeunes arbres de l’abroutissement par les ongulés.

Pour que les tirs de régulation aient un sens, il faut absolument que les milieux scientifiques soient consultés et surtout, que les « bons loups » soient visés.

Pourquoi cette obstination du canton à agir seul, sans concertation, sans écoute des faits scientifiques?

Pourquoi le Valais refuse-t-il de mettre en place un groupe Grands Prédateurs, comme le fait le canton de Vaud? Pourquoi refuser toute table ronde, tout dialogue, toute ouverture à des experts indépendants?

Le Valais ne peut pas faire cavalier seul. Il est temps d’ouvrir le débat et d’adopter une gestion basée sur les faits, et non sur des peurs irrationnelles ou des intérêts à court terme. C’est ainsi que l’on se préoccupe vraiment des préoccupations des éleveurs et éleveuses, pas en agitant de manière émotionnelle la figure du grand méchant loup.

La nature ne se plie pas aux agendas politiques. 🌿🌿🐺

Christophe Clivaz

 

La Suisse se montrera-t-elle pionnière en inscrivant dans sa Constitution le respect des limites planétaires?

La Suisse se montrera-t-elle pionnière en inscrivant dans sa Constitution le respect des limites planétaires?

popouLe 9 février prochain, le peuple suisse pourra prendre une décision inédite, mais pourtant cohérente avec les engagement que la Suisse à pris. Celle de tourner la page d’un système en crise. Nous savons toutes et tous que notre économie est largement dépendante de la surexploitation des ressources naturelles et de la destruction de l’environnement. Nous savons également que cela n’est pas viable et qu’il faut inévitablement modifier les règles du jeu.

C’est précisément le but de l’initiative pour la responsabilité environnementale: que l’économie respecte la capacité de renouvellement de la nature, à l’échelle du pays. Cela signifie que la Suisse ne doit porter atteinte à l’environnement que dans la mesure où la nature peut se régénérer afin de conserver les bases vitales de notre existence.

Un système économique mortifère

Cette capacité de la nature à se renouveler est mesurée grâce aux limites planétaires. Trois d’entre elles concernent des ressources naturelles fondamentales: la consommation d’eau, l’utilisation du sol et l’ajout d’azote et de phosphore comme engrais agricole. À celles-ci s’ajoutent le déclin de la biodiversité et le changement climatique. Plus une limite est dépassée, plus le risque de changements environnementaux irréversibles augmente.

Les effets du dépassement des limites planétaires sont dramatiques, et nous les ressentons déjà aujourd’hui, en Valais comme ailleurs. Laves torrentielles, tempêtes, incendies de forêts, eaux polluées, présence des polluants éternels (PFAS) dans nos sols, résidus de plastique dans nos corps, etc. Le système économique actuel est mortifère et doit être profondément réorienté, c’est ce que propose l’initiative.

De plus, l’initiative inclut et tient compte d’un point essentiel: l’acceptabilité sociale.

L’initiative mentionne clairement que sa mise en œuvre doit être socialement acceptable en Suisse et à l’étranger. Cela garantit aussi qu’en aucun cas des mesures ne pourront nuire à la population et en particulier aux personnes et entreprises les plus précaires.

La Suisse pourrait devenir un leader mondial en montrant la voie pour une politique qui allie justice sociale et justice environnementale.

Repenser en profondeur notre système économique

Si l’initiative est acceptée, c’est le Parlement qui sera chargé de la mettre en œuvre. Il pourrait ainsi par exemple décider de supprimer les milliards d’aides financières étatiques nocives pour le climat et la biodiversité, d’investir dans la transition écologique, de promouvoir une gouvernance participative des entreprises, d’interdire la publicité pour les produits nocifs pour l’environnement ou d’obliger les multinationales à rendre des comptes sur les conséquences sociales et environnementales de leurs activités.Ce sont là quelques exemples de mesures qui pourraient permettre de mettre en œuvre cette initiative qui constitue une véritable chance pour que la Suisse fasse œuvre de pionnier et montre comment un pays peut passer à un système socio-économique post-croissance respectant les limites planétaires.

Cette initiative est sans doute celle dont nous avons le plus besoin pour créer une société juste et viable sur le long terme. Grâce à la responsabilité environnementale, nous pouvons surmonter notre dépendance à la croissance, investir massivement et rapidement dans la transition écologique, avoir des lois efficaces pour réorienter les activités dommageables à l’environnement et repenser nos modes de production et de consommation afin de les rendre compatibles avec les bases du vivant. Dire Oui à cette initiative, c’est une évidence : qui peut être favorable à une économie qui détruit les bases du vivant ?

Christophe Clivaz

Plus d’infos sur l’initiative pour la responsabilité environnementale

 

Les limites planétaires sont les seuils que l’humanité ne devrait pas dépasser pour ne pas compromettre les conditions favorables dans lesquelles elle a pu se développer et pour pouvoir durablement vivre dans un écosystème sûr, c’est-à-dire en évitant les modifications brutales et difficilement prévisibles de l’environnement planétaire.

Image: Les limites planétaires et leur dépassement en 2023. Le cercle en pointillés représente l’estimation des limites de durabilité et les zones colorées l’estimation de leur état fin 2023, la couleur orange représentant un dépassement. Les neuf limites planétaires sont, dans le sens antihoraire et en partant du haut :
(1) Changement climatique
(2) Érosion de la biodiversité
(3) Modifications des usages des sols
(4) Utilisation d’eau douce

Source: Wikipédia

(5) Perturbation des cycles biochimiques de l’azote et du phosphore
(6) Acidification des océans
(7) Aérosols atmosphériques
(8) Diminution de la couche d’ozone
(9) Pollution chimique (nouvelles entités)

Armée et frein aux dépenses, vaches sacrées de la politique suisse

Armée et frein aux dépenses, vaches sacrées de la politique suisse

Budget: le parlement a décidé d’augmenter massivement le budget de l’armée et compenser par des baisses dans d’autres domaines. Cela nuit à la prospérité de la Suisse.

Budget 2025 : des coupes injustifiées au détriment de la population

Comme chaque année, la session de décembre au Parlement suisse a été marquée par de longues discussions sur le budget 2025 et la planification financière 2026-2028. Si, pour la population, ces débats peuvent sembler techniques, ennuyeux ou éloignés des préoccupations quotidiennes, leurs conséquences sont pourtant bien réelles. Cette année, le mot d’ordre est clair: il faut couper dans les dépenses de l’État.

Où veut-on couper ?

L’aide pour les crèches, l’AVS, la transition énergétique, la formation et la recherche, le soutien à la culture, les trains de nuit, les transports publics, la coopération internationale, l’asile et l’intégration, ou encore le personnel de la Confédération… Tous ces secteurs essentiels risquent d’être sacrifiés. Seul l’agriculture échappe à ces coupes, et c’est tant mieux.

Pourquoi ces coupes ?

La réponse est simple : la majorité bourgeoise veut augmenter massivement les dépenses pour l’armée tout en refusant d’assouplir le frein aux dépenses. Ce mécanisme impose des budgets équilibrés, ce qui signifie que toute augmentation de dépenses dans un secteur doit être compensée par des baisses ailleurs ou par des recettes supplémentaires.

En 2025, le budget de l’armée augmentera de 530 millions de francs, avec une croissance continue pour atteindre 8 milliards de francs en 2030 – soit 1% du PIB. C’est une hausse massive et difficilement justifiable, même dans le contexte du conflit russo-ukrainien.

Une stratégie militaire irréaliste

Si certains investissements sont compréhensibles, comme la lutte contre les cyberattaques ou la préservation du débat démocratique face aux fake news, l’essentiel des moyens servira à renforcer les forces terrestres et aériennes: achat d’armements blindés, défenses anti-aériennes, capacités de combat à longue distance. Or, ces équipements ne seraient utiles que si nos pays voisins, tous membres de l’OTAN (à l’exception de l’Autriche), avaient déjà capitulé face à un agresseur. Une situation peu réaliste.

Des coupes contre l’avis de la population

Cette augmentation du budget militaire aura un coût: elle se traduira par des coupes dans les domaines cités plus haut, année après année. Pourtant, cela va à l’encontre de la volonté populaire. Le dernier sondage Sotomo sur le budget 2025 révèle que :

  • 35% des personnes interrogées souhaitent des coupes prioritaires dans le budget de l’armée.
  • 54% préfèrent privilégier l’augmentation des recettes plutôt que des coupes brutales, par exemple avec une combinaison d’économies et de nouvelles recettes.

Le Parlement, lui, choisit de ne pas actionner le levier des recettes et de continuer à réduire les dépenses. Pourtant, des solutions existent pour générer des revenus supplémentaires. L’une d’entre elles, une taxe sur les transactions financières, recueille même un avis favorable chez 53% des sondés. Mais à Berne, cette proposition n’a jamais eu la moindre chance.

Il est temps de changer de cap

Faire de l’armée et du frein aux dépenses des vaches sacrées tout en sacrifiant des services essentiels pour la population et les entreprises n’assurera pas la prospérité de notre pays. C’est pourtant le chemin que prend actuellement le Parlement, avec des conséquences qui se feront sentir pendant plusieurs années, alors qu’en tant qu’élus, nous devrions avoir le courage de proposer un budget équilibré et équitable, qui réponde aux véritables besoins de la Suisse et de ses habitants.

 

Christophe Clivaz

 

Droits des locataires en danger!

Droits des locataires en danger!

Contre l’avis du Conseil fédéral, qui ne voyait pas le besoin de modifier le droit en vigueur, la majorité bourgeoise du parlement veut affaiblir la position des locataires.

 

Le Valais a tout à perdre

Le 24 novembre prochain, nous voterons sur deux objets concernant des modifications importantes du droit du bail. Le Valais, qui est de plus en plus un peuple de locataires, a tout à perdre avec les modifications proposées.

En Suisse, environ 60 % de la population est locataire, le plus souvent non par choix mais par impossibilité de réunir les fonds propres exigés et d’avoir un revenu considéré par les instituts bancaires comme suffisamment élevé pour obtenir un prêt hypothécaire. Aucun autre pays européen ne connaît un taux de propriétaires aussi bas.

La situation est certes un peu différente en Valais mais pas tant que ça: si les propriétaires restent encore légèrement majoritaires par rapport aux locataires, l’écart se réduit, et les locataires sont déjà largement majoritaires dans les villes.

Les locataires paient 10 milliards de trop

Si on y réfléchit bien, cette situation est terriblement injuste: une majorité des ménages suisses paient un loyer durant 50 ou 60 ans, pour n’être propriétaire de rien du tout à la fin. Pendant ce temps, les sociétés immobilières, ainsi que les assurances et les banques, qui possèdent aujourd’hui une part toujours plus grande des logements locatifs en Suisse, encaissent des rendements indécents.

Comme il n’y a pas de contrôle du respect du droit du bail, qui stipule que le rendement doit être proportionné aux coûts effectifs des bailleurs, les ménages locataires paient aujourd’hui annuellement plus de 10 milliards de trop, soit en moyenne 360 francs de trop par mois. Depuis 15 ans, les loyers auraient dû diminuer en raison des baisses successives du taux d’intérêt de référence, mais c’est le contraire qui s’est produit. Les loyers ont explosé et il est devenu difficile pour la majorité de la population de trouver un logement abordable.

En cas d’acceptation de la première modification, la sous-location dépendra désormais exclusivement du bon vouloir du bailleur, alors que la loi actuelle donne le droit au locataire de sous-louer son logement, en respectant certaines conditions. Les locataires devront obtenir un consentement écrit des bailleurs pour une sous-location et, même si ceux-ci acceptent, la durée de la sous-location sera limitée à deux ans. Au bout du compte, le scénario rêvé pour tout bailleur: restitution du logement, nouveau locataire et… augmentation du loyer!

Affaiblissant la protection contre les résiliations abusives

Le second objet prévoit que, pour résilier un bail pour besoin propre, le ou la propriétaire ne devra plus faire état d’un besoin personnel « urgent » mais uniquement d’un « besoin personnel important et actuel ».

En affaiblissant la protection contre les résiliations abusives, la nouvelle loi permettra aux propriétaires d’augmenter plus facilement les loyers en procédant à des changements de locataires. Souvent, le besoin propre du bailleur n’est en effet annoncé que comme prétexte pour se débarrasser des locataires et louer ensuite le logement plus cher. Il n’y a aucun contrôle pour s’assurer que la partie bailleresse ou ses proches occupent réellement le logement après avoir notifié un congé.

« En somme, la majorité bourgeoise s’attaque au droit à un logement décent, pourtant garanti par la Constitution, et met ainsi en difficulté des milliers de locataires qui seront forcés de quitter leur logement tout en contribuant à l’augmentation générale du prix des loyers. »

On pense en particulier aux familles, aux personnes âgées, aux étudiant·e·s et aux personnes en situation de handicap. Elle favorise aussi outrageusement les régies et sociétés immobilières qui pourront encaisser des bénéfices encore plus juteux en résiliant plus facilement les contrats de bail et en augmentant ensuite les loyers pour les nouveaux locataires.

Que le début?

Adoptant la tactique du salami, le lobby immobilier, soutenu par la majorité bourgeoise du parlement, prévoit déjà de changer les règles du jeu pour fixer le prix des loyers. Plutôt que les coûts effectifs des bailleurs, règle déjà peu respectée, il devrait être possible à l’avenir de fixer le loyer en fonction des prix du marché, ce qui permettra aux bailleurs de notifier des augmentations de loyer, en particulier aux locataires de longue durée.

Ces dernières années, les loyers ont explosé et il est devenu difficile de trouver des logements abordables pour les personnes à revenu normal et les familles. Une chose est claire : si ces modifications du droit du bail sont acceptées, les locataires subiront une pression encore plus forte qu’actuellement. Dire non à ces deux modifications, c’est aussi l’occasion de dire stop aux projets de modifications législatives à venir visant à augmenter le profit des grands propriétaires immobiliers sur le dos des locataires.

 

Christophe Clivaz

Lien vers la tribune du Walliserbote.ch (en allemand)

NON à l’extension des autoroutes!

NON à l’extension des autoroutes!

Contre-intuitif mais pourtant confirmé par les observations sur le terrain: élargir les autoroutes n’améliore pas la fluidité du trafic.

Le 24 novembre prochain, la population suisse votera sur une enveloppe de 5,3 milliards de francs pour financer six grands projets d’extension des autoroutes. Parmi ces projets, un, ajouté à la dernière minute, se trouve en Suisse romande. Il s’agit de l’élargissement à deux fois trois voies sur 19km entre Le Vengeron et Nyon. Un référendum, pour lequel plus de 100’000 signatures ont été récoltées en deux mois seulement, a été lancé contre cette somme astronomique à l’heure où la Confédération ne parle que de coupes budgétaires.

Ces projets prévoient tous d’augmenter la capacité des autoroutes sur certains tronçons, que ce soit en ajoutant des voies (passage de 4 à 6 ou de 6 à 8 voies) ou en créant de nouveaux tunnels. Tous les projets sont combattus localement par des riverains et des associations locales, car cela engendrerait une augmentation du trafic, notamment dans les villes et villages alentour, là où il n’est ni possible ni souhaitable d’élargir les routes.

Autoroutes plus attractives

La justification de ces élargissements, c’est l’augmentation du trafic et des bouchons. Intuitivement on pourrait penser qu’élargir les autoroutes est une bonne solution. Mais dans les faits, d’innombrables études et observations sur le terrain confirment que tout élargissement d’autoroute crée un trafic induit, ce qui signifie que des automobilistes supplémentaires commencent à utiliser l’autoroute pour se déplacer, augmentant ainsi la charge de trafic.

Si l’autoroute est plus attractive, les gens délaissent les transports publics ou choisissent d’aller au restaurant ou faire leurs courses dans des endroits plus éloignés au lieu de rester dans leur quartier ou village. Parfois ils déménagent ou acceptent un emploi situé plus loin mais devenu plus « accessible » grâce à l’autoroute. C’est notamment pour cette raison que plus de 340 spécialistes du domaine de la mobilité viennent de lancer un appel recommandant de dire non à l’extension des autoroutes. 

Elargir un entonnoir sans augmenter la taille du goulot

Pour la Suisse, on estime qu’il suffit de seulement 10 ans après une nouvelle extension pour qu’une autoroute soit saturée. Il y aura donc toujours des bouchons, mais par exemple avec 130’000 véhicules par jour au lieu de 90’000 actuellement sur l’axe Nyon-Genève. 130’000 véhicules qui, une fois sortis de l’autoroute, se retrouveront sur un réseau de routes cantonales et communales qui ne pourra pas être élargi pour les absorber! Elargir l’entonnoir sans augmenter la taille de son goulot ne permet pas de faire passer plus d’eau…

Chantiers interminables

Durant une bonne dizaine d’années, temps nécessaire à leur construction, ces projets vont aussi occasionner des chantiers interminables, entraînant des ralentissements et des reports de trafic vers les villes, les villages et les quartiers d’habitation. La qualité de vie de toute la population sera nettement dégradée.

En outre, des alternatives bien moins coûteuses et impactantes n’ont pas été examinées, dont celle de la réaffectation des bandes d’arrêt d’urgence lors des pics de trafic : une solution déjà utilisée sur de très nombreux tronçons, qui est bien moins chère, bien plus rapide à réaliser et bien moins extrême qu’un élargissement à trois voies.

Incompatibilité avec les objectifs climatiques

Ces projets ne sont en outre pas compatibles avec les objectifs de la Loi Climat adoptée par le peuple en juin 2023. Avec cette Loi, la Suisse s’est engagée à réduire les émissions de GES du secteur des transports de 57% d’ici 2040. Or, pour reprendre l’exemple de l’extension entre Nyon et Genève, le début des travaux est prévu en 2033 pour une mise en service aux alentours de 2041.

Elargir les autoroutes et faire augmenter le trafic est en totale contradiction avec l’atteinte de cet objectif intermédiaire de la Loi Climat. Pour atteindre cet objectif, il faut plutôt investir des milliards dans le rail et les transports publics ainsi que dans les mobilités actives (marche et vélo).

En plus des émissions de GES, plus de voitures signifie aussi plus de bruit, avec son impact négatif sur la santé, et surtout plus de pollution par les microplastiques, l’usure des pneus étant la principale source de microplastiques dans notre pays. 

Grignotage de zones agricoles et espaces naturels

D’autre part, agrandir les autoroutes demandera de bétonner plus de 400’000m2 de terrains. Des forêts, des espaces naturels et aussi de précieuses terres agricoles, ce qui diminuera d’autant la production alimentaire indigène et mettra encore davantage la pression sur le monde paysan. C’est la raison pour laquelle la Chambre valaisanne d’agriculture recommande de voter non.

L’extension des autoroutes engendre enfin des coûts externes très élevés pour l’environnement et la santé que toute la population doit supporter.

Selon un récent rapport de l’ARE, qu’Albert Rösti voulait éviter de publier avant la votation, les coûts externes des transports routiers sont bien plus élevés que ce que l’on croyait jusqu’ici et se montent désormais à 17,3 milliards par an.

Les transports publics et les mobilités douces présentent à ce titre un bilan bien meilleur. Albert Rösti ne voulait pas publier ce rapport avant la votation, on comprend pourquoi!

Christophe Clivaz

En savoir plus:  https://www.actif-trafic.ch/autoroutes

 

Protégeons l’unité et la diversité de la Suisse!

Protégeons l’unité et la diversité de la Suisse!

Invité à prononcer un discours pour la fête nationale le 31 juillet à Venthône et le 1er août à Finhaut, j’ai choisi de porter l’accent sur les danger liés à la désinformation, de plus en plus présente jusque dans le couloirs du Palais Fédéral, ainsi que sur la vision d’une société dont le bonheur ne dépende pas de la consommation à outrance mais de valeurs de simplicité et de sobriété. J’ai le plaisir de le partager ici.

« Cher·ères compatriotes, cher·ères ami·es, cher·ères représentant·es des autorités,

Je tiens à remercier la Société de développement de m’avoir invité à prononcer le traditionnel discours du 1er août ici à Finhaut. C’est un honneur de pouvoir m’exprimer dans cette commune et cette vallée du Trient que j’ai l’habitude de parcourir en long et en large pendant mes vacances.

Nous sommes ici ce soir pour célébrer ensemble la fête nationale suisse, une journée qui nous rappelle non seulement notre histoire commune, mais aussi les valeurs qui nous unissent et qui font la force de notre pays.

 

Une histoire de liberté et d’entraide

Il y a plus de sept siècles, en 1291, les représentants des cantons d’Uri, de Schwyz et d’Unterwald se sont réunis pour signer le Pacte fédéral. Cet acte fondateur, symbole de liberté et d’entraide, a marqué le début de notre Confédération. En accueillant le Valais en son sein en 1815, la Suisse a non seulement élargi ses frontières, mais a aussi enrichi son patrimoine commun, démontrant ainsi que l’union dans la diversité est une source de force et de prospérité. Ensemble, nous continuons à construire une Suisse inclusive, où chaque canton, chaque commune et chaque individu, quel que soit son genre, son âge, sa couleur de peau ou son orientation sexuelle, a sa place et contribue au bien commun.

Depuis 1891, soit l’année où il a été décidé à l’occasion du 600ème anniversaire du Pacte fédéral que la fête nationale se déroulerait le 1er août, nous honorons chaque année cet héritage, cette volonté farouche d’indépendance et de solidarité, qui continue de guider notre pays.

 

La démocratie menacée par la désinformation

Notre système politique, unique en son genre, est l’un des plus grands atouts de la Suisse. La démocratie semi-directe permet à chaque citoyen de participer activement à la vie politique, non seulement en élisant des représentants, mais aussi en prenant directement part aux décisions par le biais des initiatives et des référendums. Cette proximité entre le peuple et le pouvoir garantit une gouvernance plus transparente, plus responsable et plus en accord avec les aspirations de chacun. Nous devons être fiers de cette particularité qui nous permet de façonner notre avenir de manière collective et démocratique.

Cependant, il est crucial de reconnaître et de se prémunir contre les dangers qui menacent notre culture démocratique. La propagation de fausses informations, les fake news, ou de contenus audios et vidéos créés ou modifiés grâce à l’intelligence artificielle, les deepfakes, représente une menace réelle pour la transparence et la confiance qui sont au cœur de notre système politique. Elle peut semer la confusion, diviser notre société et influencer de manière indue les processus décisionnels.

En Suisse, où chaque voix compte et où chaque citoyen a le pouvoir de façonner la politique, la protection de l’intégrité de l’information est essentielle. Il est de notre devoir collectif de promouvoir l’éducation aux médias, de soutenir un journalisme de qualité et de rester vigilants face à ces nouvelles formes de désinformation. En renforçant nos défenses contre les fausses informations et les contenus audios et vidéos manipulés, nous préservons la santé de notre démocratie et garantissons que le débat public reste basé sur des faits véridiques et une discussion honnête.

 

L’influence des lobbys et la place de la science

Sur ce dernier point, mon expérience bernoise me laisse assez songeur:

Les lobbyistes de tout poil arpentent librement les couloirs du Palais fédéral en distillant des informations pas toujours correctes et surtout partielles et incomplètes.

À l’opposé, les scientifiques sont souvent mal reçus lorsqu’ils viennent présenter les résultats de leurs recherches qui montrent par exemple que la Suisse est en queue de classement européen en matière de biodiversité, avec la moitié des milieux naturels et un tiers des espèces qui sont menacés, ou que l’activité humaine est responsable du dérèglement climatique et de l’augmentation des événements extrêmes, comme on vient malheureusement d’en avoir une nouvelle confirmation avec les crues de cet été.

Les hautes écoles suisses produisent des savoirs importants et utiles qui devraient davantage servir de base pour la prise de décision dans les milieux politiques comme auprès de la population.

 

Les défis géopolitiques et l’importance de la solidarité

Nous ne devons pas non plus oublier les défis que notre pays doit relever dans un contexte géopolitique en constante évolution. La mondialisation, les crises économiques, les tensions internationales et les enjeux environnementaux sont autant de facteurs qui impactent notre quotidien et notre avenir. La Suisse, en tant que nation neutre et prospère, a un rôle important à jouer sur la scène internationale.

Notre engagement pour la paix, la diplomatie et la coopération internationale est crucial. Nous devons continuer à défendre nos valeurs de dialogue, de respect et de solidarité au-delà de nos frontières, malgré le découragement qui peut parfois poindre lorsque des conflits s’enlisent et semblent insolubles ou lorsque nos efforts diplomatiques ne sont pas immédiatement couronnés de succès.

La tentation peut être grande de préférer nous recroqueviller sur nous-mêmes et nous désintéresser des défis globaux. Mais c’est oublier que dans une société et une économie aussi mondialisées que la Suisse, ces défis ont bien sûr de nombreuses répercussions dans notre pays, comme on l’a vu avec la pandémie de COVID-19 ou le déclenchement de la guerre en Ukraine.

Le bonheur, ce n’est pas consommer

Vous le savez, mon engagement politique est fortement lié à la question des relations que l’homme entretient avec la nature. À ce titre, je souhaiterais que nous réussissions à nous orienter davantage vers une société basée sur des valeurs de simplicité et de sobriété.

Si l’innovation technologique et le renforcement des prescriptions légales sont nécessaires, je suis convaincu qu’elles ne suffiront pas pour répondre aux défis écologiques sans un changement de valeurs par rapport à la société de consommation.

Je suis toujours surpris de constater que nos enfants sont de plus en plus sensibilisés aux questions environnementales, par l’intermédiaire notamment de l’école, mais que dans le même temps ils sont bombardés quotidiennement de messages publicitaires leur faisant passer un message simple : « si tu veux être heureux, consomme ! ».

Pour sortir de cette schizophrénie, un changement de valeurs est nécessaire.

Nous devons rééduquer notre désir, nous affranchir de la publicité omniprésente, comprendre que posséder des objets et consommer à tout va n’est pas gage de bonheur. Le bonheur vient bien davantage de la qualité de nos relations affectives, de l’amour partagé, de la réalisation de nos aspirations profondes, d’une vie en bonne santé et de la qualité de nos expériences, notamment en nature.

Le bonheur ne s’achète pas par la possession de biens matériels, il se construit au travers de nos relations sociales.

Construire une Suisse forte et juste

Chers compatriotes, chers amis, la Suisse a toujours su surmonter les obstacles grâce à la cohésion, à son esprit d’initiative et à sa capacité à se réinventer. Continuons à cultiver ces qualités, à renforcer notre solidarité et à promouvoir notre modèle démocratique. Et tâchons de nous libérer des sirènes du consumérisme pour privilégier la simplicité dans nos manières de vivre. Ensemble, nous pouvons bâtir une Suisse encore plus forte, plus juste et plus respectueuse de notre planète et du bien-être de nos enfants.

Je vous souhaite à toutes et à tous une joyeuse fête nationale.