A quoi pourrait ressembler la mise en œuvre de l’initiative Pour la responsabilité environnementale ?

A quoi pourrait ressembler la mise en œuvre de l’initiative Pour la responsabilité environnementale ?

Le peuple suisse se prononcera la 9 février sur un seul objet: l’initiative lancée par les Jeunes Vert·e·s·x concernant la responsabilité environnementale de la Suisse. 

Si l’initiative est acceptée c’est bien sûr le Parlement qui sera en charge de rédiger la loi d’application et de choisir les mesures qui permettront la mise en œuvre du texte de l’initiative. Mais concrètement, comment pourrait se faire cette mise en œuvre? Cinq exemples.

Supprimer les incitations financières dommageables au climat et à la biodiversité

Supprimer les subventions et allègements fiscaux nuisibles au climat et à la biodiversité. Par exemple, le transport aérien international, qui est exonéré de l’impôt sur les huiles minérales et de la TVA, bénéficie d’une subvention ayant un fort impact sur le climat. La suppression de ces allègements fiscaux permettrait de réduire les émissions de CO de près de 1,5 million de tonnes par an et de générer potentiellement des recettes fiscales supplémentaires de plus de 1,3 milliard de francs.

Investir dans la transition écologique et l’économie circulaire

Il faut investir massivement afin de diminuer l’impact écologique de notre mobilité, de notre système énergétique ou de notre système de production industrielle. Un généreux programme d’investissement public doit pour ce faire être mis en place, y compris en vue de former et mobiliser la main-d’œuvre autour d’objectifs sociaux et écologiques urgents dans l’isolation des bâtiments, les énergies renouvelables ou les processus d’économie circulaire.

Rendre le commerce international durable

Du fait de l’importance de la place financière et du négoce des matières premières en Suisse, notre pays dispose d’un levier d’action très important pour un commerce mondial juste et compatible avec les limites planétaires. Pour cela il faut que la Suisse s’engage activement au niveau international afin de modifier les règles du commerce international tout en définissant des règles de diligence strictes pour les multinationales opérant depuis son territoire.

Interdire la publicité pour les produits dommageables à l’environnement

La publicité est omniprésente et pousse à la surconsommation. Elle nous incite à vouloir posséder ce qui est nouveau et à la mode, dans une spirale de consommation qui semble infinie. Diminuer l’exposition marketing aux produits nocifs pour l’environnement doit permettre de réduire l’envie de les acheter.

Promouvoir une gouvernance participative des entreprises

Aujourd’hui ce sont le top management et les actionnaires qui définissent les stratégies entrepreneuriales dans une logique de profit prenant insuffisamment en compte les conséquences sociales et environnementales. Il faut changer cet état de fait et introduire des dispositions législatives visant à instaurer une « démocratie économique », soit la participation active des citoyen·ne·s et des travailleur·euse·s dans la gestion des entreprises.

Plus d’infos 

Christophe Clivaz

 

Armée et frein aux dépenses, vaches sacrées de la politique suisse

Armée et frein aux dépenses, vaches sacrées de la politique suisse

Budget: le parlement a décidé d’augmenter massivement le budget de l’armée et compenser par des baisses dans d’autres domaines. Cela nuit à la prospérité de la Suisse.

Budget 2025 : des coupes injustifiées au détriment de la population

Comme chaque année, la session de décembre au Parlement suisse a été marquée par de longues discussions sur le budget 2025 et la planification financière 2026-2028. Si, pour la population, ces débats peuvent sembler techniques, ennuyeux ou éloignés des préoccupations quotidiennes, leurs conséquences sont pourtant bien réelles. Cette année, le mot d’ordre est clair: il faut couper dans les dépenses de l’État.

Où veut-on couper ?

L’aide pour les crèches, l’AVS, la transition énergétique, la formation et la recherche, le soutien à la culture, les trains de nuit, les transports publics, la coopération internationale, l’asile et l’intégration, ou encore le personnel de la Confédération… Tous ces secteurs essentiels risquent d’être sacrifiés. Seul l’agriculture échappe à ces coupes, et c’est tant mieux.

Pourquoi ces coupes ?

La réponse est simple : la majorité bourgeoise veut augmenter massivement les dépenses pour l’armée tout en refusant d’assouplir le frein aux dépenses. Ce mécanisme impose des budgets équilibrés, ce qui signifie que toute augmentation de dépenses dans un secteur doit être compensée par des baisses ailleurs ou par des recettes supplémentaires.

En 2025, le budget de l’armée augmentera de 530 millions de francs, avec une croissance continue pour atteindre 8 milliards de francs en 2030 – soit 1% du PIB. C’est une hausse massive et difficilement justifiable, même dans le contexte du conflit russo-ukrainien.

Une stratégie militaire irréaliste

Si certains investissements sont compréhensibles, comme la lutte contre les cyberattaques ou la préservation du débat démocratique face aux fake news, l’essentiel des moyens servira à renforcer les forces terrestres et aériennes: achat d’armements blindés, défenses anti-aériennes, capacités de combat à longue distance. Or, ces équipements ne seraient utiles que si nos pays voisins, tous membres de l’OTAN (à l’exception de l’Autriche), avaient déjà capitulé face à un agresseur. Une situation peu réaliste.

Des coupes contre l’avis de la population

Cette augmentation du budget militaire aura un coût: elle se traduira par des coupes dans les domaines cités plus haut, année après année. Pourtant, cela va à l’encontre de la volonté populaire. Le dernier sondage Sotomo sur le budget 2025 révèle que :

  • 35% des personnes interrogées souhaitent des coupes prioritaires dans le budget de l’armée.
  • 54% préfèrent privilégier l’augmentation des recettes plutôt que des coupes brutales, par exemple avec une combinaison d’économies et de nouvelles recettes.

Le Parlement, lui, choisit de ne pas actionner le levier des recettes et de continuer à réduire les dépenses. Pourtant, des solutions existent pour générer des revenus supplémentaires. L’une d’entre elles, une taxe sur les transactions financières, recueille même un avis favorable chez 53% des sondés. Mais à Berne, cette proposition n’a jamais eu la moindre chance.

Il est temps de changer de cap

Faire de l’armée et du frein aux dépenses des vaches sacrées tout en sacrifiant des services essentiels pour la population et les entreprises n’assurera pas la prospérité de notre pays. C’est pourtant le chemin que prend actuellement le Parlement, avec des conséquences qui se feront sentir pendant plusieurs années, alors qu’en tant qu’élus, nous devrions avoir le courage de proposer un budget équilibré et équitable, qui réponde aux véritables besoins de la Suisse et de ses habitants.

 

Christophe Clivaz

 

Protégeons l’unité et la diversité de la Suisse!

Protégeons l’unité et la diversité de la Suisse!

Invité à prononcer un discours pour la fête nationale le 31 juillet à Venthône et le 1er août à Finhaut, j’ai choisi de porter l’accent sur les danger liés à la désinformation, de plus en plus présente jusque dans le couloirs du Palais Fédéral, ainsi que sur la vision d’une société dont le bonheur ne dépende pas de la consommation à outrance mais de valeurs de simplicité et de sobriété. J’ai le plaisir de le partager ici.

« Cher·ères compatriotes, cher·ères ami·es, cher·ères représentant·es des autorités,

Je tiens à remercier la Société de développement de m’avoir invité à prononcer le traditionnel discours du 1er août ici à Finhaut. C’est un honneur de pouvoir m’exprimer dans cette commune et cette vallée du Trient que j’ai l’habitude de parcourir en long et en large pendant mes vacances.

Nous sommes ici ce soir pour célébrer ensemble la fête nationale suisse, une journée qui nous rappelle non seulement notre histoire commune, mais aussi les valeurs qui nous unissent et qui font la force de notre pays.

 

Une histoire de liberté et d’entraide

Il y a plus de sept siècles, en 1291, les représentants des cantons d’Uri, de Schwyz et d’Unterwald se sont réunis pour signer le Pacte fédéral. Cet acte fondateur, symbole de liberté et d’entraide, a marqué le début de notre Confédération. En accueillant le Valais en son sein en 1815, la Suisse a non seulement élargi ses frontières, mais a aussi enrichi son patrimoine commun, démontrant ainsi que l’union dans la diversité est une source de force et de prospérité. Ensemble, nous continuons à construire une Suisse inclusive, où chaque canton, chaque commune et chaque individu, quel que soit son genre, son âge, sa couleur de peau ou son orientation sexuelle, a sa place et contribue au bien commun.

Depuis 1891, soit l’année où il a été décidé à l’occasion du 600ème anniversaire du Pacte fédéral que la fête nationale se déroulerait le 1er août, nous honorons chaque année cet héritage, cette volonté farouche d’indépendance et de solidarité, qui continue de guider notre pays.

 

La démocratie menacée par la désinformation

Notre système politique, unique en son genre, est l’un des plus grands atouts de la Suisse. La démocratie semi-directe permet à chaque citoyen de participer activement à la vie politique, non seulement en élisant des représentants, mais aussi en prenant directement part aux décisions par le biais des initiatives et des référendums. Cette proximité entre le peuple et le pouvoir garantit une gouvernance plus transparente, plus responsable et plus en accord avec les aspirations de chacun. Nous devons être fiers de cette particularité qui nous permet de façonner notre avenir de manière collective et démocratique.

Cependant, il est crucial de reconnaître et de se prémunir contre les dangers qui menacent notre culture démocratique. La propagation de fausses informations, les fake news, ou de contenus audios et vidéos créés ou modifiés grâce à l’intelligence artificielle, les deepfakes, représente une menace réelle pour la transparence et la confiance qui sont au cœur de notre système politique. Elle peut semer la confusion, diviser notre société et influencer de manière indue les processus décisionnels.

En Suisse, où chaque voix compte et où chaque citoyen a le pouvoir de façonner la politique, la protection de l’intégrité de l’information est essentielle. Il est de notre devoir collectif de promouvoir l’éducation aux médias, de soutenir un journalisme de qualité et de rester vigilants face à ces nouvelles formes de désinformation. En renforçant nos défenses contre les fausses informations et les contenus audios et vidéos manipulés, nous préservons la santé de notre démocratie et garantissons que le débat public reste basé sur des faits véridiques et une discussion honnête.

 

L’influence des lobbys et la place de la science

Sur ce dernier point, mon expérience bernoise me laisse assez songeur:

Les lobbyistes de tout poil arpentent librement les couloirs du Palais fédéral en distillant des informations pas toujours correctes et surtout partielles et incomplètes.

À l’opposé, les scientifiques sont souvent mal reçus lorsqu’ils viennent présenter les résultats de leurs recherches qui montrent par exemple que la Suisse est en queue de classement européen en matière de biodiversité, avec la moitié des milieux naturels et un tiers des espèces qui sont menacés, ou que l’activité humaine est responsable du dérèglement climatique et de l’augmentation des événements extrêmes, comme on vient malheureusement d’en avoir une nouvelle confirmation avec les crues de cet été.

Les hautes écoles suisses produisent des savoirs importants et utiles qui devraient davantage servir de base pour la prise de décision dans les milieux politiques comme auprès de la population.

 

Les défis géopolitiques et l’importance de la solidarité

Nous ne devons pas non plus oublier les défis que notre pays doit relever dans un contexte géopolitique en constante évolution. La mondialisation, les crises économiques, les tensions internationales et les enjeux environnementaux sont autant de facteurs qui impactent notre quotidien et notre avenir. La Suisse, en tant que nation neutre et prospère, a un rôle important à jouer sur la scène internationale.

Notre engagement pour la paix, la diplomatie et la coopération internationale est crucial. Nous devons continuer à défendre nos valeurs de dialogue, de respect et de solidarité au-delà de nos frontières, malgré le découragement qui peut parfois poindre lorsque des conflits s’enlisent et semblent insolubles ou lorsque nos efforts diplomatiques ne sont pas immédiatement couronnés de succès.

La tentation peut être grande de préférer nous recroqueviller sur nous-mêmes et nous désintéresser des défis globaux. Mais c’est oublier que dans une société et une économie aussi mondialisées que la Suisse, ces défis ont bien sûr de nombreuses répercussions dans notre pays, comme on l’a vu avec la pandémie de COVID-19 ou le déclenchement de la guerre en Ukraine.

Le bonheur, ce n’est pas consommer

Vous le savez, mon engagement politique est fortement lié à la question des relations que l’homme entretient avec la nature. À ce titre, je souhaiterais que nous réussissions à nous orienter davantage vers une société basée sur des valeurs de simplicité et de sobriété.

Si l’innovation technologique et le renforcement des prescriptions légales sont nécessaires, je suis convaincu qu’elles ne suffiront pas pour répondre aux défis écologiques sans un changement de valeurs par rapport à la société de consommation.

Je suis toujours surpris de constater que nos enfants sont de plus en plus sensibilisés aux questions environnementales, par l’intermédiaire notamment de l’école, mais que dans le même temps ils sont bombardés quotidiennement de messages publicitaires leur faisant passer un message simple : « si tu veux être heureux, consomme ! ».

Pour sortir de cette schizophrénie, un changement de valeurs est nécessaire.

Nous devons rééduquer notre désir, nous affranchir de la publicité omniprésente, comprendre que posséder des objets et consommer à tout va n’est pas gage de bonheur. Le bonheur vient bien davantage de la qualité de nos relations affectives, de l’amour partagé, de la réalisation de nos aspirations profondes, d’une vie en bonne santé et de la qualité de nos expériences, notamment en nature.

Le bonheur ne s’achète pas par la possession de biens matériels, il se construit au travers de nos relations sociales.

Construire une Suisse forte et juste

Chers compatriotes, chers amis, la Suisse a toujours su surmonter les obstacles grâce à la cohésion, à son esprit d’initiative et à sa capacité à se réinventer. Continuons à cultiver ces qualités, à renforcer notre solidarité et à promouvoir notre modèle démocratique. Et tâchons de nous libérer des sirènes du consumérisme pour privilégier la simplicité dans nos manières de vivre. Ensemble, nous pouvons bâtir une Suisse encore plus forte, plus juste et plus respectueuse de notre planète et du bien-être de nos enfants.

Je vous souhaite à toutes et à tous une joyeuse fête nationale.

La victoire de Nemo doit nous ouvrir à la non-binarité

La victoire de Nemo doit nous ouvrir à la non-binarité

En remportant l’Eurovision en mai dernier, Nemo a fait rayonné la Suisse à l’international. Si la couverture médiatique de l’événement a d’abord été festive et témoignait d’une certaine fierté pour cette victoire, elle a rapidement accordé une grande place à la question de l’identité de genre. Nemo, qui revendique ouvertement être non-binaire, nous offre l’occasion de mettre la question de la reconnaissance de la non-binarité à l’agenda du parlement suisse.

 

100’000 à 150’000 personnes non binaires en Suisse

Mais au fond, la non-binarité, c’est quoi? Elle concerne toute personne dont l’expérience intérieure et individuelle du genre n’est pas binaire, c’est-à-dire ni exclusivement féminine ou masculine. Dans sa chanson, Nemo raconte d’ailleurs son chemin compliqué pour s’accepter et vivre avec l’identité de genre qui correspond vraiment à sa personne. La non-binarité est non seulement de mieux en mieux comprise, mais aussi de plus en plus acceptée par la population. C’est réjouissant, car selon le rapport de la Commission nationale d’éthique de 2020, il y a entre 100’000 et 150’000 personnes non-binaires en Suisse, soit à peu près autant de personnes que compte la ville de Berne.

Mais la réalité juridique en Suisse reste insatisfaisante. Le fonctionnement de l’État, qui régit les bases de la vie sociale, est construit de manière binaire, et cela se répercute sur les institutions et infrastructures du pays. Les personnes non-binaires souffrent quotidiennement d’une énorme pression d’adaptation et doivent faire face à des comportements discriminatoires.

La reconnaissance de la non-binarité est une question de dignité humaine et de garantie de liberté d’être soi-même.

Face à cette réalité, le Conseil fédéral ferme les yeux et ne souhaite rien changer. Dans un communiqué publié fin 2022, il affirmait que les « conditions sociales » nécessaires à l’instauration d’un troisième genre ou à l’abandon de la mention du genre dans le registre de l’état civil « ne sont pas encore réunies ».

 

Vers la reconnaissance d’un 3ème genre

Certes, le genre sert encore de point de référence dans une série de domaines comme le service militaire, le droit des assurances sociales et le droit de la famille. La reconnaissance d’un troisième genre nécessite donc plusieurs adaptations des lois actuelles, mais cela n’a rien de compliqué en soi et les révisions de lois font partie du quotidien des pays démocratiques. D’ailleurs, de nombreux pays dont les Etats-Unis, l’Allemagne, le Danemark, l’Argentine ou encore le Canada ont déjà introduit la possibilité d’inscrire un troisième genre à l’état civil, sans que cela crée de grandes difficultés administratives. Introduire la possibilité de choisir l’option « divers » à l’état civil est certes une étape importante pour inclure pleinement les personnes non-binaires dans la société, mais il s’agit surtout d’une question de dignité humaine et de garantie de la liberté d’être soi-même.

Si la victoire de Nemo était avant tout la victoire d’une prestation musicale de grande qualité, indépendante de la question de la non-binarité, celle-ci aura eu l’effet louable d’avoir ouvert un débat national sur cette question et sur la nécessité de reconnaître et d’accepter enfin les personnes non-binaires. C’est maintenant au tour des parlementaires d’agir afin de trouver des solutions pragmatiques permettant aux personnes non-binaires de ne pas se sentir discriminées.

 

 

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Deux initiatives de santé : allègement des primes ou médecine à deux vitesses?

Deux initiatives de santé : allègement des primes ou médecine à deux vitesses?

Le 9 juin, deux initiatives pourraient transformer notre système de santé. Comment voter pour qu’il cesse d’être un fardeau?

Oui à une meilleure répartition du fardeau des primes d’assurance-maladie

 

La première initiative, dite « initiative d’allègement des primes » demande que les primes d’assurance maladie soient subventionnées pour ne pas excéder 10% du revenu disponible d’un ménage.

Cette mesure est essentielle pour maintenir l’équité et l’accessibilité du système de santé suisse. En effet, Le système actuel impose un fardeau disproportionné aux ménages à faibles et moyens revenus, qui ont de plus en plus de peine à payer les primes d’assurance maladie. En plafonnant ces primes à 10% du revenu, l’initiative vise à garantir que chaque citoyen puisse accéder à des soins de qualité sans compromettre sa situation financière et réduire ainsi les iniquités sociales de santé.

« Entre 15 et 25% des personnes en Suisse ont déjà renoncé à des soins nécessaires pour des raisons financières. »

Il est, en effet, alarmant de constater que, selon les études, entre 15 et 25% des personnes en Suisse ont déjà renoncé à des soins nécessaires pour des raisons financières et nombreux sont celles qui choisissent un modèle d’assurance-maladie non adapté à leurs besoins de santé dans une logique de payer le moins possible. Cette tendance est susceptible de s’aggraver si aucune mesure concrète n’est prise pour rendre les soins plus abordables.

L’initiative peut directement contribuer à prévenir une telle dégradation en rendant les assurances-maladies plus accessibles et en évitant que les citoyens ne doivent choisir entre santé et stabilité économique. Elle est donc un premier pas essentiel vers un système de santé plus équitable.

L’injustice est d’autant plus grande qu’il existe de grandes disparités intercantonales en termes de subventions aux primes d’assurance-maladie, alors que les besoins pour les ménages à faibles et moyens revenus sont similaires. Une harmonisation de ces subventions au niveau fédéral garantirait que tous, en Suisse, obtiennent le même soutien en fonction de leurs besoins.

Accepter cette initiative du PS est un pas important pour soulager les ménages de la classe moyenne. Et donnerait un signe clair au parlement qui devra prochainement se prononcer sur la motion que les Vert·e·s ont déposé en juin 2023 : un montant des primes fixé en fonction du revenu et de la fortune des ménages.

« Soutenez une répartition équitable des primes pour un système de santé accessible à tous. OUI à l’ Initiative d’allègement des primes »

 

Non à une médecine à deux vitesses

La deuxième initiative « Pour des primes plus basses. Frein aux coûts dans le système de santé » a été déposée par Le Centre.

Derrière ce titre alléchant se cache une initiative dangereuse qui ouvre tout grand la voie à une médecine à deux vitesses. Son acceptation amènerait l’assurance de base à exclure certaines prestations pour maintenir les coûts sous contrôle, laissant les traitements non couverts à la charge des patient·e·s ou à des assurances complémentaires plus coûteuses. Par conséquent, seul·e·s les patient·e·s les plus aisé·e·s pourraient se permettre des traitements de meilleure qualité ou plus rapides.

« Si l’initiative pour le frein aux coûts est acceptée, la Confédération pourrait économiser 1,2 milliard dès 2027, au prix de 12,000 postes supprimés. »

De plus, cette initiative engendrerait une pression insupportable sur le personnel soignant. Imposer un plafond aux coûts sans augmenter l’efficacité ou les ressources pourrait aggraver le burnout et la pénurie de personnel qualifié, compromettant ainsi la qualité des soins dispensés. Les sociétés romandes de médecine ont calculé l’impact de cette initiative. Si le peuple venait à accepter le texte, la Confédération serait menée à faire 1,2 milliard d’économie dès 2027, soit l’équivalent de la suppression de 12’000 postes dans le domaine des soins, à une période où les besoins sont en augmentation du fait du vieillissement de la population et de l’augmentation de la prévalence des maladies chroniques.

De même, si cette initiative avait été mise en œuvre en 2000, on ne rembourserait plus un tiers des prestations actuelles, ce qui mettrait considérablement en danger la qualité du système de santé et aurait, sans aucun doute, un impact négatif sur l’espérance de vie de la population.

Ce qu’il y a de plus absurde avec cette initiative reste le fait de lier les coûts de la santé avec l’évolution de l’économie et des salaires. En effet, ces dernières années ont mis en évidence les fluctuations importantes de l’économie mondiale et ses répercussions sur l’économie suisse fortement dépendante de la conjoncture internationale. Or les besoins de santé ne dépendent pas des fluctuations de l’économie suisse! Que se passera-t-il les années où l’économie se portera moins bien? Devra-t-on renoncer aux soins ou arrêter de rembourser des traitements nécessaires?

Pire, il est très bien documenté que les besoins de santé tendent à augmenter en période de crise économique, la santé étant fortement associée à la précarité sociale et matérielle. Or, avec cette initiative, le gouvernement serait donc amené à prendre des mesures de contrôle des coûts au pire des moments, quand les besoins sont potentiellement le plus élevé. De plus, il est impossible de prévoir des phénomènes tels que la pandémie de COVID-19 qui engendreraient des besoins de santé très élevés que la rigidité d’une telle initiative ne permettrait pas de couvrir.

 

Au-delà du 9 juin : axer le système sur la santé plutôt que sur la maladie

Le débat sur le financement de la santé est crucial, mais il ne doit pas occulter la nécessité de repenser notre système de santé dans une perspective plus globale. Il est essentiel de passer d’un système principalement orienté vers le traitement des maladies à un système véritablement axé sur la santé. Cela implique une plus grande focalisation sur la prévention et la promotion de la santé. Au lieu de concentrer les ressources uniquement sur la guérison, un système de santé réformé devrait prioriser le maintien de la population en bonne santé.

Cela pourrait se traduire par des investissements accrus dans les programmes de prévention tels que l’éducation à la santé dès le plus jeune âge, la lutte contre toute forme de pollution, la réduction des inégalités, la promotion de l’activité physique et d’une alimentation saine. Ces mesures, en réduisant l’incidence des maladies chroniques et autres affections évitables, permettraient de diminuer la demande sur les services de soins aigus et spécialisés, tout en améliorant la qualité de vie globale de la population.

En parallèle, il est impératif de considérer la durabilité et l’équité comme des piliers fondamentaux du système de santé. Les coûts financiers associés aux soins sont bien connus, mais les impacts sociaux et environnementaux le sont moins. Par exemple, l’industrie de la santé génère une quantité significative de déchets et consomme d’importantes ressources énergétiques. Adopter une approche plus durable pourrait inclure la réduction des déchets médicaux, l’optimisation des traitements pour favoriser les produits moins polluants et plus durables, et l’intégration de critères écologiques dans les appels d’offres du secteur de la santé.

D’un point de vue social, un système de santé équitable devrait garantir que chaque individu, quelle que soit sa situation socio-économique, ait accès aux mêmes soins de qualité. Cela nécessite des politiques qui vont au-delà des simples ajustements des primes d’assurance et qui abordent les inégalités structurelles affectant l’accès aux soins.

En définitive, un système de santé repensé autour de ces axes ne sera pas seulement plus juste et durable, mais également plus efficace, en atténuant les pressions sur les services de soins et en améliorant la santé globale de la population.

Un parlement gangréné par les lobbys

Nous avons besoin d’un système de santé fort pour faire face aux défis démographiques, économiques, sociaux et environnementaux de la décennie qui vient. Malheureusement, toute réforme du système de soins est presque impossible à obtenir au parlement tant les lobbys, avec la complicité active des nombreux parlementaires ayant des liens d’intérêt avec les acteurs de la santé, maintiennent un statu quo qui ne profite ni aux citoyennes et citoyens, ni aux patientes et patients, ni aux professionnel·le·s de la santé.

Par conséquent, c’est au souverain, le peuple, de continuer à dicter l’agenda politique sur les questions de santé, comme il a su le faire ses dernières années avec les initiatives pour des soins infirmiers forts, l’interdiction de la publicité sur les produits du tabac auprès des mineurs, les différentes lois COVID, l’intégration des médecines complémentaires ou encore l’encouragement à la médecine de premier recours.

Le 9 juin prochain, les citoyennes et citoyens auront une nouvelle fois l’opportunité de guider le monde politique pour un système de santé plus équitable et pérenne en soutenant l’initiative pour l’allègement des primes et en rejetant l’initiative pour le frein aux coûts de la santé.

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