Droits des locataires en danger!
Contre l’avis du Conseil fédéral, qui ne voyait pas le besoin de modifier le droit en vigueur, la majorité bourgeoise du parlement veut affaiblir la position des locataires.
Le Valais a tout à perdre
Le 24 novembre prochain, nous voterons sur deux objets concernant des modifications importantes du droit du bail. Le Valais, qui est de plus en plus un peuple de locataires, a tout à perdre avec les modifications proposées.
En Suisse, environ 60 % de la population est locataire, le plus souvent non par choix mais par impossibilité de réunir les fonds propres exigés et d’avoir un revenu considéré par les instituts bancaires comme suffisamment élevé pour obtenir un prêt hypothécaire. Aucun autre pays européen ne connaît un taux de propriétaires aussi bas.
La situation est certes un peu différente en Valais mais pas tant que ça: si les propriétaires restent encore légèrement majoritaires par rapport aux locataires, l’écart se réduit, et les locataires sont déjà largement majoritaires dans les villes.
Les locataires paient 10 milliards de trop
Si on y réfléchit bien, cette situation est terriblement injuste: une majorité des ménages suisses paient un loyer durant 50 ou 60 ans, pour n’être propriétaire de rien du tout à la fin. Pendant ce temps, les sociétés immobilières, ainsi que les assurances et les banques, qui possèdent aujourd’hui une part toujours plus grande des logements locatifs en Suisse, encaissent des rendements indécents.
Comme il n’y a pas de contrôle du respect du droit du bail, qui stipule que le rendement doit être proportionné aux coûts effectifs des bailleurs, les ménages locataires paient aujourd’hui annuellement plus de 10 milliards de trop, soit en moyenne 360 francs de trop par mois. Depuis 15 ans, les loyers auraient dû diminuer en raison des baisses successives du taux d’intérêt de référence, mais c’est le contraire qui s’est produit. Les loyers ont explosé et il est devenu difficile pour la majorité de la population de trouver un logement abordable.
En cas d’acceptation de la première modification, la sous-location dépendra désormais exclusivement du bon vouloir du bailleur, alors que la loi actuelle donne le droit au locataire de sous-louer son logement, en respectant certaines conditions. Les locataires devront obtenir un consentement écrit des bailleurs pour une sous-location et, même si ceux-ci acceptent, la durée de la sous-location sera limitée à deux ans. Au bout du compte, le scénario rêvé pour tout bailleur: restitution du logement, nouveau locataire et… augmentation du loyer!
Affaiblissant la protection contre les résiliations abusives
Le second objet prévoit que, pour résilier un bail pour besoin propre, le ou la propriétaire ne devra plus faire état d’un besoin personnel « urgent » mais uniquement d’un « besoin personnel important et actuel ».
En affaiblissant la protection contre les résiliations abusives, la nouvelle loi permettra aux propriétaires d’augmenter plus facilement les loyers en procédant à des changements de locataires. Souvent, le besoin propre du bailleur n’est en effet annoncé que comme prétexte pour se débarrasser des locataires et louer ensuite le logement plus cher. Il n’y a aucun contrôle pour s’assurer que la partie bailleresse ou ses proches occupent réellement le logement après avoir notifié un congé.
« En somme, la majorité bourgeoise s’attaque au droit à un logement décent, pourtant garanti par la Constitution, et met ainsi en difficulté des milliers de locataires qui seront forcés de quitter leur logement tout en contribuant à l’augmentation générale du prix des loyers. »
On pense en particulier aux familles, aux personnes âgées, aux étudiant·e·s et aux personnes en situation de handicap. Elle favorise aussi outrageusement les régies et sociétés immobilières qui pourront encaisser des bénéfices encore plus juteux en résiliant plus facilement les contrats de bail et en augmentant ensuite les loyers pour les nouveaux locataires.
Que le début?
Adoptant la tactique du salami, le lobby immobilier, soutenu par la majorité bourgeoise du parlement, prévoit déjà de changer les règles du jeu pour fixer le prix des loyers. Plutôt que les coûts effectifs des bailleurs, règle déjà peu respectée, il devrait être possible à l’avenir de fixer le loyer en fonction des prix du marché, ce qui permettra aux bailleurs de notifier des augmentations de loyer, en particulier aux locataires de longue durée.
Ces dernières années, les loyers ont explosé et il est devenu difficile de trouver des logements abordables pour les personnes à revenu normal et les familles. Une chose est claire : si ces modifications du droit du bail sont acceptées, les locataires subiront une pression encore plus forte qu’actuellement. Dire non à ces deux modifications, c’est aussi l’occasion de dire stop aux projets de modifications législatives à venir visant à augmenter le profit des grands propriétaires immobiliers sur le dos des locataires.
Christophe Clivaz