Droits des locataires en danger!

Droits des locataires en danger!

Contre l’avis du Conseil fédéral, qui ne voyait pas le besoin de modifier le droit en vigueur, la majorité bourgeoise du parlement veut affaiblir la position des locataires.

 

Le Valais a tout à perdre

Le 24 novembre prochain, nous voterons sur deux objets concernant des modifications importantes du droit du bail. Le Valais, qui est de plus en plus un peuple de locataires, a tout à perdre avec les modifications proposées.

En Suisse, environ 60 % de la population est locataire, le plus souvent non par choix mais par impossibilité de réunir les fonds propres exigés et d’avoir un revenu considéré par les instituts bancaires comme suffisamment élevé pour obtenir un prêt hypothécaire. Aucun autre pays européen ne connaît un taux de propriétaires aussi bas.

La situation est certes un peu différente en Valais mais pas tant que ça: si les propriétaires restent encore légèrement majoritaires par rapport aux locataires, l’écart se réduit, et les locataires sont déjà largement majoritaires dans les villes.

Les locataires paient 10 milliards de trop

Si on y réfléchit bien, cette situation est terriblement injuste: une majorité des ménages suisses paient un loyer durant 50 ou 60 ans, pour n’être propriétaire de rien du tout à la fin. Pendant ce temps, les sociétés immobilières, ainsi que les assurances et les banques, qui possèdent aujourd’hui une part toujours plus grande des logements locatifs en Suisse, encaissent des rendements indécents.

Comme il n’y a pas de contrôle du respect du droit du bail, qui stipule que le rendement doit être proportionné aux coûts effectifs des bailleurs, les ménages locataires paient aujourd’hui annuellement plus de 10 milliards de trop, soit en moyenne 360 francs de trop par mois. Depuis 15 ans, les loyers auraient dû diminuer en raison des baisses successives du taux d’intérêt de référence, mais c’est le contraire qui s’est produit. Les loyers ont explosé et il est devenu difficile pour la majorité de la population de trouver un logement abordable.

En cas d’acceptation de la première modification, la sous-location dépendra désormais exclusivement du bon vouloir du bailleur, alors que la loi actuelle donne le droit au locataire de sous-louer son logement, en respectant certaines conditions. Les locataires devront obtenir un consentement écrit des bailleurs pour une sous-location et, même si ceux-ci acceptent, la durée de la sous-location sera limitée à deux ans. Au bout du compte, le scénario rêvé pour tout bailleur: restitution du logement, nouveau locataire et… augmentation du loyer!

Affaiblissant la protection contre les résiliations abusives

Le second objet prévoit que, pour résilier un bail pour besoin propre, le ou la propriétaire ne devra plus faire état d’un besoin personnel « urgent » mais uniquement d’un « besoin personnel important et actuel ».

En affaiblissant la protection contre les résiliations abusives, la nouvelle loi permettra aux propriétaires d’augmenter plus facilement les loyers en procédant à des changements de locataires. Souvent, le besoin propre du bailleur n’est en effet annoncé que comme prétexte pour se débarrasser des locataires et louer ensuite le logement plus cher. Il n’y a aucun contrôle pour s’assurer que la partie bailleresse ou ses proches occupent réellement le logement après avoir notifié un congé.

« En somme, la majorité bourgeoise s’attaque au droit à un logement décent, pourtant garanti par la Constitution, et met ainsi en difficulté des milliers de locataires qui seront forcés de quitter leur logement tout en contribuant à l’augmentation générale du prix des loyers. »

On pense en particulier aux familles, aux personnes âgées, aux étudiant·e·s et aux personnes en situation de handicap. Elle favorise aussi outrageusement les régies et sociétés immobilières qui pourront encaisser des bénéfices encore plus juteux en résiliant plus facilement les contrats de bail et en augmentant ensuite les loyers pour les nouveaux locataires.

Que le début?

Adoptant la tactique du salami, le lobby immobilier, soutenu par la majorité bourgeoise du parlement, prévoit déjà de changer les règles du jeu pour fixer le prix des loyers. Plutôt que les coûts effectifs des bailleurs, règle déjà peu respectée, il devrait être possible à l’avenir de fixer le loyer en fonction des prix du marché, ce qui permettra aux bailleurs de notifier des augmentations de loyer, en particulier aux locataires de longue durée.

Ces dernières années, les loyers ont explosé et il est devenu difficile de trouver des logements abordables pour les personnes à revenu normal et les familles. Une chose est claire : si ces modifications du droit du bail sont acceptées, les locataires subiront une pression encore plus forte qu’actuellement. Dire non à ces deux modifications, c’est aussi l’occasion de dire stop aux projets de modifications législatives à venir visant à augmenter le profit des grands propriétaires immobiliers sur le dos des locataires.

 

Christophe Clivaz

Lien vers la tribune du Walliserbote.ch (en allemand)

NON à l’extension des autoroutes!

NON à l’extension des autoroutes!

Contre-intuitif mais pourtant confirmé par les observations sur le terrain: élargir les autoroutes n’améliore pas la fluidité du trafic.

Le 24 novembre prochain, la population suisse votera sur une enveloppe de 5,3 milliards de francs pour financer six grands projets d’extension des autoroutes. Parmi ces projets, un, ajouté à la dernière minute, se trouve en Suisse romande. Il s’agit de l’élargissement à deux fois trois voies sur 19km entre Le Vengeron et Nyon. Un référendum, pour lequel plus de 100’000 signatures ont été récoltées en deux mois seulement, a été lancé contre cette somme astronomique à l’heure où la Confédération ne parle que de coupes budgétaires.

Ces projets prévoient tous d’augmenter la capacité des autoroutes sur certains tronçons, que ce soit en ajoutant des voies (passage de 4 à 6 ou de 6 à 8 voies) ou en créant de nouveaux tunnels. Tous les projets sont combattus localement par des riverains et des associations locales, car cela engendrerait une augmentation du trafic, notamment dans les villes et villages alentour, là où il n’est ni possible ni souhaitable d’élargir les routes.

Autoroutes plus attractives

La justification de ces élargissements, c’est l’augmentation du trafic et des bouchons. Intuitivement on pourrait penser qu’élargir les autoroutes est une bonne solution. Mais dans les faits, d’innombrables études et observations sur le terrain confirment que tout élargissement d’autoroute crée un trafic induit, ce qui signifie que des automobilistes supplémentaires commencent à utiliser l’autoroute pour se déplacer, augmentant ainsi la charge de trafic.

Si l’autoroute est plus attractive, les gens délaissent les transports publics ou choisissent d’aller au restaurant ou faire leurs courses dans des endroits plus éloignés au lieu de rester dans leur quartier ou village. Parfois ils déménagent ou acceptent un emploi situé plus loin mais devenu plus « accessible » grâce à l’autoroute. C’est notamment pour cette raison que plus de 340 spécialistes du domaine de la mobilité viennent de lancer un appel recommandant de dire non à l’extension des autoroutes. 

Elargir un entonnoir sans augmenter la taille du goulot

Pour la Suisse, on estime qu’il suffit de seulement 10 ans après une nouvelle extension pour qu’une autoroute soit saturée. Il y aura donc toujours des bouchons, mais par exemple avec 130’000 véhicules par jour au lieu de 90’000 actuellement sur l’axe Nyon-Genève. 130’000 véhicules qui, une fois sortis de l’autoroute, se retrouveront sur un réseau de routes cantonales et communales qui ne pourra pas être élargi pour les absorber! Elargir l’entonnoir sans augmenter la taille de son goulot ne permet pas de faire passer plus d’eau…

Chantiers interminables

Durant une bonne dizaine d’années, temps nécessaire à leur construction, ces projets vont aussi occasionner des chantiers interminables, entraînant des ralentissements et des reports de trafic vers les villes, les villages et les quartiers d’habitation. La qualité de vie de toute la population sera nettement dégradée.

En outre, des alternatives bien moins coûteuses et impactantes n’ont pas été examinées, dont celle de la réaffectation des bandes d’arrêt d’urgence lors des pics de trafic : une solution déjà utilisée sur de très nombreux tronçons, qui est bien moins chère, bien plus rapide à réaliser et bien moins extrême qu’un élargissement à trois voies.

Incompatibilité avec les objectifs climatiques

Ces projets ne sont en outre pas compatibles avec les objectifs de la Loi Climat adoptée par le peuple en juin 2023. Avec cette Loi, la Suisse s’est engagée à réduire les émissions de GES du secteur des transports de 57% d’ici 2040. Or, pour reprendre l’exemple de l’extension entre Nyon et Genève, le début des travaux est prévu en 2033 pour une mise en service aux alentours de 2041.

Elargir les autoroutes et faire augmenter le trafic est en totale contradiction avec l’atteinte de cet objectif intermédiaire de la Loi Climat. Pour atteindre cet objectif, il faut plutôt investir des milliards dans le rail et les transports publics ainsi que dans les mobilités actives (marche et vélo).

En plus des émissions de GES, plus de voitures signifie aussi plus de bruit, avec son impact négatif sur la santé, et surtout plus de pollution par les microplastiques, l’usure des pneus étant la principale source de microplastiques dans notre pays. 

Grignotage de zones agricoles et espaces naturels

D’autre part, agrandir les autoroutes demandera de bétonner plus de 400’000m2 de terrains. Des forêts, des espaces naturels et aussi de précieuses terres agricoles, ce qui diminuera d’autant la production alimentaire indigène et mettra encore davantage la pression sur le monde paysan. C’est la raison pour laquelle la Chambre valaisanne d’agriculture recommande de voter non.

L’extension des autoroutes engendre enfin des coûts externes très élevés pour l’environnement et la santé que toute la population doit supporter.

Selon un récent rapport de l’ARE, qu’Albert Rösti voulait éviter de publier avant la votation, les coûts externes des transports routiers sont bien plus élevés que ce que l’on croyait jusqu’ici et se montent désormais à 17,3 milliards par an.

Les transports publics et les mobilités douces présentent à ce titre un bilan bien meilleur. Albert Rösti ne voulait pas publier ce rapport avant la votation, on comprend pourquoi!

Christophe Clivaz

En savoir plus:  https://www.actif-trafic.ch/autoroutes

 

La nature et le paysage, sources de notre prospérité

La nature et le paysage, sources de notre prospérité

Face à l’effondrement des écosystèmes, l’initiative Biodiversité vient rappeler que nous sommes dépendants d’écosystèmes qui fonctionnent

En Suisse, la nature va mal. Un tiers des espèces animales et végétales sont menacées ou ont déjà disparu. La moitié des espaces vitaux subsistant pour les animaux et les plantes sont menacés. C’est la raison pour laquelle l’initiative Biodiversité a été déposée.

Notre survie en tant qu’espèce dépend directement de la protection de la nature et de nos paysages. Sans biodiversité, nos écosystèmes cessent de fonctionner, mettant en péril les fondements mêmes de notre prospérité. Parce que sans polinisateurs qui  permettent à nos cultures de produire, sans forêts qui purifient nos eaux et nous protègent des avalanches ou des éboulements, sans des sols vivants qui permettent les rendements agricoles, sans la diversité des substances actives des plantes qui permettent de nous soigner, sans les promenades dans de beaux paysages qui nous font nous sentir bien,  l’espèce humaine ne peut simplement pas vivre.

Et ce fonctionnement des écosystèmes est aujourd’hui mis en danger, les scientifiques parlent d’ailleurs d’une 6ème extinction de masse au niveau de la planète tant la disparition des espèces est rapide.

 

Echec des objectifs de la Stratégie biodiversité suisse et promesses non tenues

Malheureusement les mesures prises jusqu’ici ne sont pas suffisantes et une grande partie des objectifs de la Stratégie biodiversité de la Confédération, adoptée en 2012, n’ont pas été atteints. De plus, le parlement vient de renoncer à ce qui avait été promis lors de la campagne sur les initiatives pesticides, à savoir augmenter à 3,5% les surfaces de promotion de la biodiversité dans les grandes cultures du Plateau où elles ne représentent que 1%, bien loin des 19% atteints en moyenne dans l’agriculture, grâce en particulier à l’engagement des paysans de montagne.

Les opposants trompent l’opinion en affirmant que 30% du territoire serait sanctuarisé. C’est faux.

Il est nécessaire de comprendre que la biodiversité ne se limite pas aux aires protégées. Mais aussi les villes et agglomérations, les villages, les zones industrielles, etc.).

Si la Suisse accuse un retard inquiétant en Europe sur ce point, il est essentiel de veiller à la qualité des écosystèmes dans l’ensemble du territoire, y compris en zones urbaines.  Enlever du béton et planter des arbres, des mesures qui nous permettront aussi de nous adapter au réchauffement dans les villes.

Qualité de la nature et des paysage: un produit touristique

Enfin, pour un canton touristique comme le Valais, il est évident qu’une biodiversité intacte et de beaux paysages constituent d’importants atouts. Dire Oui à l’initiative Biodiversité c’est assurer la qualité de nos paysages naturels et bâtis qui ont une valeur inestimable pour l’activité touristique, car ils sont en fait très souvent le produit touristique lui- même! C’est aussi assurer des espaces de récréation de qualité pour la population résidente.

Le Conseil des Etats n’a pas voulu de contre-projet et ne reconnaît pas la nécessité d’agir. Il ne reste dès lors plus d’autre choix que de dire OUI à l’initiative afin de faire pression sur le parlement pour qu’il décide de mesures permettant de maintenir les bases du vivant, gage de notre prospérité.

Christophe Clivaz

Lien vers la tribune du Walliserbote.ch (en allemand)

Pourquoi voter « OUI » à la Loi pour l’électricité est essentiel pour le climat et le paysage

Pourquoi voter « OUI » à la Loi pour l’électricité est essentiel pour le climat et le paysage

Le 9 juin, un choix crucial nous attend concernant la Loi pour l’électricité. Face aux critiques des opposants, il est primordial de rectifier certaines idées reçues et de souligner l’importance capitale de cette loi pour notre avenir énergétique et environnemental. Explications.

La pesée des intérêts entre protection et exploitation reste la règle

Dans la campagne, les débats risquent de se focaliser sur la tension entre production d’électricité renouvelable et protection du paysage. Le curseur a effectivement été déplacé un peu, dans la pesée des intérêts, en faveur de la production des énergies renouvelables par rapport à la protection de la nature et du paysage. Les ordonnances d’application, qui sont en phase de consultation, sont cependant rassurantes. Elles précisent bien qu’il ne s’agit en aucun cas de démanteler la protection de la nature et du paysage et que la pesée des intérêts reste la règle. Dire le contraire est simplement faux.

 

Augmentation importante de la production d’énergie renouvelable sur le bâti existant

Si la campagne va se focaliser sur la tension entre production d’énergie renouvelable et protection de la nature et du paysage, le point essentiel de la loi est pourtant ailleurs. Le Parlement a fixé des objectifs très ambitieux en termes de production d’électricité renouvelable. Au moins 35 TWh d’électricité devront être produits en 2035 grâce aux énergies renouvelables (hydraulique non compris), et 45 TWh en 2050. Pour donner un ordre de grandeur, la consommation d’électricité annuelle en Suisse est de l’ordre de 56-57 TWh aujourd’hui et la production hydroélectrique actuelle 37 TWh.

Concrètement c’est en très grande partie le développement du PV sur les toits et les infrastructures qui apportera ces TWh supplémentaires, même si l’éolien et la biomasse ont aussi un rôle à jouer.

Si les débats se focalisent ainsi beaucoup sur les potentielles atteintes au paysage, il faut souligner que cette loi permet de facto que 80 à 90 % du développement des énergies renouvelables se fasse sur les infrastructures existantes.

Et cette forte progression du PV est tout à fait réaliste. En 2023, 1,5 TWh de courant supplémentaire ont été connectées au réseau, soit 50% de plus que l’année précédente. En 2024 le PV produira 10% de la consommation électrique suisse. D’après les projections, même prudentes, le PV produira environ 15 TWh en 2030 (aujourd’hui 6 TWh) dont près de 5 TWh en hiver, soit 5 fois plus que ce qui est espéré avec la production hivernale des parcs solaires alpins…

L’objectif de cette importante production électrique renouvelable supplémentaire, c’est de parvenir à décarboner les systèmes de chauffage (remplacement du mazout et du gaz par des pompes à chaleur) et la mobilité (électrification du parc de véhicules). Dire non à la loi pour l’électricité, c’est ainsi dire oui au maintien de notre dépendance aux énergies fossiles provenant de pays souvent peu démocratiques et refuser d’augmenter notre sécurité d’approvisionnement en énergie.

 

Une Loi qui respecte la nature et le paysage

La situation est évidemment très différente si une installation photovoltaïque alpine ou une éolienne est prévue dans une zone déjà marquée par la main de l’homme et les infrastructures, ou si elle est envisagée dans une nature encore intacte. La loi sur l’électricité précise que lors de la délimitation dans les plans directeurs cantonaux des zones appropriées pour les installations solaires et éoliennes d’importance nationale, les cantons doivent tenir compte des intérêts de protection, et en premier lieu de la protection du paysage. Il est dès lors clair que les installations éoliennes et solaires doivent être construites avant tout hors des paysages protégés inscrits à l’Inventaire fédéral des paysages d’importances nationale (IFP).

Les zones délimitées comme appropriées, dans lesquelles les installations solaires et éoliennes ont la priorité, ne doivent ainsi explicitement pas se trouver dans des paysages d’importance nationale. Ceux-ci couvrent tout de même 17% du territoire national. C’est précisément parce que les installations éoliennes et solaires ont la priorité sur d’autres intérêts dans les zones dites appropriées qu’il sera dissuasif d’en construire ailleurs. Ainsi, cela soulagera les autres territoires, considérant que les projets seront réalisés en priorité dans les zones appropriées délimitées.

 

Une pesée des intérêts aussi pour l’énergie hydraulique

Il en va de même pour l’énergie hydraulique. Le législateur a choisi ici une autre voie et, sur la base d’un accord issu de la table ronde sur l’hydroélectricité, a défini 16 projets qui bénéficient d’un intérêt accru. Cela conduira également à une canalisation et à une concentration des projets. La Fondation pour la protection et l’aménagement du paysage, dont je suis membre du Conseil de fondation, s’est certes prononcée contre un des projets, celui du Gorner, parce qu’elle n’a pas encore obtenu suffisamment d’informations sur ce projet pour pouvoir évaluer son impact sur le paysage. Et pourtant la Fondation soutient la loi pour l’électricité car elle permet de continuer à prendre en compte ces considérations liées au paysage. La priorité donnée en principe à la production d’électricité sur d’autres intérêts d’importance nationale ne signifie en effet pas que toute installation projetée sera forcément autorisée. Un examen au cas par cas et une pesée des intérêts restent obligatoires, y compris pour les projets de la table ronde comme celui du Gorner ou pour les projets d’éoliennes ou de parcs solaires dans les zones appropriées. Ce sont ces différents arguments qui ont convaincu tant Pro Natura, la Fondation suisse pour l’aménagement et la protection du paysage, Aqua Viva, Birdlife, le WWF, Greenpeace ou Mountain Wilderness, des associations qui mettent au centre de leur activité la défense du paysage et de la biodiversité, de soutenir la loi et de s’opposer au référendum.

 

Une facture d’électricité réduite pour les ménages et les entreprises

Il faut noter aussi que pour la première fois un programme d’efficacité a été intégré dans la loi: les fournisseurs d’électricité devront atteindre des objectifs en la matière et faire chaque année économiser du courant à leurs clients. C’est notamment grâce à cette mesure que doit être atteint la diminution de 2 TWh de la consommation d’électricité d’ici 2035 exigée par la loi. Une diminution qui sera bonne pour le portemonnaie tant des privés que des entreprises.

De plus, grâce à l’introduction d’une prime de marché flottante pour les grandes installations d’énergie renouvelable, la rentabilité de ces dernières sera assurée. Lorsque le prix de l’électricité est élevé, la Confédération ne soutiendra pas financièrement et pourra même récupérer de l’argent alors que si les prix sont bas, les exploitants bénéficieront d’une rémunération minimale leur permettant d’atteindre le seuil de rentabilité.

En remplaçant les énergies fossiles comme le mazout, l’essence ou le gaz par de l’électricité, on réduira également les risques de forte fluctuation des prix lors de crises grâce à une augmentation de l’électricité produite localement. Enfin, la Loi sur l’électricité ne prévoit aucune taxe ou impôt supplémentaire.

Une loi très importante pour protéger le climat

Je me suis battu au parlement contre les volontés d’affaiblir la protection de la nature et du paysage, avec un certain succès puisqu’initialement il était prévu de permettre la construction d’installations dans les biotopes d’importance nationale ainsi que de suspendre les débits résiduels dans les cours d’eau. Si je regrette certains affaiblissements mineurs apportés à la protection de la nature et du paysage, il ne faut surtout pas jeter le bébé avec l’eau du bain. La loi pour l’électricité est une loi importante pour que la Suisse sorte des énergies fossiles et augmente sa sécurité en matière d’approvisionnement en énergie. Elle constitue une étape décisive dans l’atteinte des objectifs en matière de protection du climat fixés dans la Loi Climat adoptée par le peuple en juin de l’année dernière.

 

La loi ne favorise pas les grands parcs solaires alpins

Sur ce dernier point, il est important de préciser que les dispositions concernant le SolarExpress, adoptées par le parlement en septembre 2022, ne sont pas concernées par le référendum. Que l’on soit pour ou contre ces grands parcs solaires, il sera toujours possible d’en construire, avec 60% de subventionnement public, jusqu’à ce qu’une production de 2 TWh/an soit atteinte. Dire non à la loi pour l’électricité ne permettra pas d’empêcher leur construction, contrairement à ce que laissent volontiers entendre les opposants.

 

Christophe Clivaz

 

En savoir plus: https://loielectricite-oui.ch/

 

Ecoanxiété chez les jeunes: il faut une réponse politique concrète!

Ecoanxiété chez les jeunes: il faut une réponse politique concrète!

Face à l’accroissement mondial de l’écoanxiété, la nécessité d’actions politiques tangibles devient impérative. Alors que les citoyens du monde entier prennent de plus en plus conscience des risques actuels et futurs engendrés par le réchauffement, il est crucial que les responsables politiques proposent des solutions concrètes, au lieu de jeter l’anathème sur la jeune génération qui milite pour le changement.

Phénomène complexe

L’écoanxiété, ou anxiété climatique, est un phénomène complexe dont les causes et conséquences sont encore mal comprises. Elle se définit comme une détresse liée au climat et aux crises écologiques. Il est toutefois reconnu qu’elle est souvent fondée sur une anxiété constructive, c’est-à-dire que, bien que douloureuse et pénible, elle est rationnelle et n’implique pas de maladie mentale (1). Au contraire, c’est une émotion qui alerte d’un danger et qui peut amener à l’action, à la recherche d’informations et de solutions potentielles. Elle peut ainsi être considérée comme bénéfique, car elle permet d’amener les gens à réévaluer leur comportement ou à se mobiliser pour des changements politiques et structurels. Toutefois, comme la crise climatique est très complexe et qu’il n’existe pas de solution claire et facile, l’écoanxiété peut facilement devenir trop intense, voire écrasante pour une partie de la population, en particulier la jeune génération, souvent plus informée et donc exposée à la réalité de la crise climatique.

75 % des personnes ont déclaré qu’elles pensaient que l’avenir était effrayant

Selon une récente étude publiée dans la revue Lancet Planet Health et réalisée auprès de 10’000 jeunes de 16 à 25 ans dans 10 pays du monde, 84% des personnes sont préoccupées par la crise climatique (dont 59 % très préoccupées) (2).

Plus de 50 % ont fait part de chacune des émotions suivantes : tristesse, anxiété, colère, impuissance, détresse et culpabilité. Pire, 45 % ont déclaré que leurs sentiments à l’égard du changement climatique affectaient négativement leur vie quotidienne et leur fonctionnement et 75 % ont déclaré qu’elles pensaient que l’avenir était effrayant. L’écoanxiété est évidente à la fois dans les pays qui subissent déjà des impacts importants du changement climatique, tels que les Philippines, une nation très vulnérable aux inondations et aux typhons. Elle l’est également dans les pays où les impacts directs sont moins graves, comme le Royaume-Uni ou la Suisse, où les populations sont relativement protégées contre les phénomènes météorologiques extrêmes.

 

Réponse des gouvernements inadéquate

Ce qui est particulièrement intéressant dans cette étude, c’est que l’écoanxiété est corrélée à la perception d’une réponse inadéquate du gouvernement et à un sentiment de trahison qui y est associé. Ainsi, l’écoanxiété est plus importante lorsque les jeunes pensent que la réponse du gouvernement est inadéquate. L’incapacité des gouvernements à réduire, prévenir ou atténuer le changement climatique de manière adéquate contribue donc à la détresse psychologique des personnes écoanxieuses. À terme, ces niveaux élevés de détresse et de sentiment de trahison auront un impact négatif sur la santé mentale des jeunes générations, mais aussi sur la cohésion sociale de nos sociétés.

Il est donc de notre devoir, en tant que politicien-ne et élu-e, de répondre à cette écoanxiété, non pas en psychiatrisant ou en banalisant cyniquement une souffrance rationnelle, mais bien en agissant pour une politique climatique forte et ceci à toutes les échelles, communale, cantonale, fédérale et internationale. Nous nous devons de regagner la confiance de cette génération et de travailler avec elle pour faire de la question climatique une priorité des politiques environnementales, énergétiques et sociales de cette législature. Malheureusement, les décisions récentes du gouvernement et du parlement tels que la volonté d’élargir les autoroutes ou le rejet sans contre-projet de l’initiative des Jeunes Verts pour la responsabilité environnementale sont autant de mauvais signaux envoyés à la jeune génération concernant la volonté d’agir du gouvernement en faveur du climat…

 

Notes/références:

1. Berry, H.L., Waite, T.D., Dear, K.B.G. et al. The case for systems thinking about climate change and mental health. Nature Clim Change 8, 282–290 (2018). https://doi.org/10.1038/s41558-018-0102-4

2. Hickman C, Marks E, Pihkala P, Clayton S, Lewandowski RE, Mayall EE, Wray B, Mellor C, van Susteren L. Climate anxiety in children and young people and their beliefs about government responses to climate change: a global survey. The Lancet Planetary Health. 2021 Dec 1;5(12):e863-73.